Wegovy, le miracle anti-obésité hors de prix
Analyse de la situation des patients face a la politique de prix du Géant NovoNordisk
C’est sans grande surprise qu’en ce début octobre arrive la commercialisation du Wegovy.
En effet, l’accord de cohorte ayant pris fin il y a un an, les patients étaient depuis fin septembre dans l’obligation d’acheter eux-mêmes leur traitement. Une douche froide pour la plupart des patients qui ont servi de cobayes à Novo Nordisk, et qui ne pourront pas continuer leur traitement à de tels tarifs. Pourtant, dans d’autres pays, le traitement est prévu gratuitement à vie.
Ainsi, en ce début octobre, la seule composante inconnue était le prix…
Et c’est donc une douche froide pour les quelques milliers de personnes éligibles au traitement.
Avec un prix prohibitif de 360 euros pour le dosage le plus élevé, la firme pharmaceutique envoie un message clair : « le traitement ne sera pas accessible à tous ». C’est d’ailleurs ce qu’avait indiqué le PDG de Novo dans son discours en 2023. il explose le compteur en France.
L’obésité est reconnue par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme une maladie chronique d’origine multifactorielle. Elle résulte de l’interaction complexe entre des facteurs génétiques, environnementaux, psychologiques et métaboliques. En ce sens, elle requiert souvent un traitement à long terme, voire à vie.
Le Saxenda, un médicament destiné au traitement de l’obésité et le premier agoniste des récepteurs GLP-1 à avoir été commercialisé, n’a pas réussi à s’imposer sur le marché en termes de ventes et approche désormais la fin de son brevet. Il semble donc inévitable que cette molécule soit en voie de disparition. Pourquoi n’a-t-elle pas connu le même succès que l’Ozempic ?
Le Saxenda, proposé au prix de 375 dollars, n’a pas suscité le même engouement du a son prix et son efficacité moindre. Son successeur plus abordable, à 133 dollars, soit près de la moitié du prix, avec un coût de seulement 7 euros pour les patients diabétiques, a été largement privilégié pour le traitement de l’obésité. D’autant plus qu’à l’époque, il n’existait aucun concurrent direct avant l’arrivée du Mounjaro en novembre 2022.
Deux facteurs majeurs semblent être en cause : le battage médiatique et le prix.
Le succès de l’Ozempic s’est principalement construit en Australie, après la parution d’un article dans un quotidien dénonçant une pénurie ainsi qu’un usage détourné du médicament.
Le partage massif d’informations via la plateforme TikTok a exacerbé les tensions en matière d’approvisionnement en Australie, à l’instar de nombreux autres pays. Cependant, ces tensions ne semblent pas exclusivement imputables à une demande accrue de la part des personnes souffrant d’obésité, mais plutôt à l’incapacité du fabricant à produire suffisamment de doses et à répartir équitablement les stocks entre les pays. Aux États-Unis, ces doses sont commercialisées à des prix variant entre 950 et 1 350 dollars.
L’alarmisme autour du « détournement » de ce médicament a non seulement créé une demande accrue et immédiate, mais a également contribué à la stigmatisation des personnes suivant un traitement contre l’obésité. Pire encore, cela a engendré une confusion quant aux autorisations officielles d’utilisation du sémaglutide.
La grande muette, comme je l’appelle, cette entreprise qui dépasse même LVMH, ne publie que des communiqués de presse calculés pour monétiser ses effets d’annonce à des moments stratégiques. Elle relègue le bien-être des patients au second plan au bénéfice de l’ultra- rentabilité pour les actionnaires.
C’est également le principal bailleur de fonds de nombreuses associations de patients et un acteur majeur des plus puissants lobbys. Malheureusement ce travail de l’ombre ce fait au détriment des malades victimes collatérales d’une politique financière agressive.
Les gouvernements sont eux aussi pris au piège, subissant la pression d’une demande croissante de solutions pour enrayer l’épidémie d’obésité qui pèse également sur les systèmes de santé.
À titre d’exemple, si la sécurité sociale américaine, Medicare, devait rembourser le Wegovy au prix de 1360 dollars, cela conduirait à la faillite de Medicare (selon le Sénat américain). Senateur Cassidy Oct 2024
Approximation du nombre de personnes ayant un IMC supérieur a 30 en Belgique
Depuis début octobre, la France commercialise le sémaglutide avec une AMM pour l’obésité, mais pas pour le diabète… Présenté comme une innovation majeure par l’entreprise, il est prétendument plus dosé (ce qui est factuellement faux, puisque la concentration du produit est quasiment identique à celle de l’Ozempic). La seule véritable différence réside dans la dose maximale recommandée, qui est de 1 mg pour l’Ozempic contre 2,4 mg pour le Wegovy.
Novo Nordisk a été le premier à commercialiser les GLP-1. Le Saxenda (2021), une des premières hormones « miracle » dédiées à la perte de poids, a été vendu entre 250 et 380 euros. C’est donc une base de référence pour les traitements suivants, puisque dans la plupart des pays, les traitements disponibles sont comparés pour déterminer le prix des nouveaux arrivants. D’autres composantes sont vues, mais les systèmes sont très opaques… trop pour savoir ce qu’il en est des manigances des uns et des autres….
Une récente étude menée par Yale début 2024 a montré que l’Inde et le Pakistan peuvent produire ce type de médicaments pour moins de 5 euros tout en restant rentables. De plus, la molécule concurrente, le tirzépatide, a été commercialisée à 25 euros pendant deux ans.
Si l’on considère que ce traitement est souvent nécessaire à vie, comme pour le diabète de type 2, il est évident que les prix actuels sont trop élevés. Un prix plus accessible, autour de 25 euros par mois, pourrait être envisagé et serait soutenable pour les systèmes de santé.
Il est également essentiel de mettre en place des mesures strictes pour éviter tout détournement de ces médicaments à des fins esthétiques, afin de garantir leur utilisation par ceux qui en ont réellement besoin.
Prix approximatifs selon les distributeurs et dosages
Les patients bien informés continueront-ils à utiliser l’Ozempic par soucis d’économie, menaçant ainsi la continuité des traitements pour les diabétiques ? Que feront les médecins ?
Le traitement Wegovy risque-t-il d’être délaissé par les personnes souffrant d’obésité sévère, qui ne pourront pas en supporter les coûts ?
Un an sous Wegovy coûtera trois fois plus qu’une chirurgie bariatrique, qui offre pourtant des résultats plus stables et à long terme. En Belgique, par exemple, le coût net pour le patient après remboursement mutuelle est d’environ 1200 euros pour une chirurgie bariatrique.
De plus, il est à craindre qu’il y ait un mésusage du Wegovy par des personnes ayant seulement quelques kilos à perdre, et qui trouveraient intéressant d’investir dans deux mois de traitement et d’espérer perdre 10 kilos.
L’accès équitable aux traitements est une question cruciale dans la lutte contre l’obésité. Il est impératif que l’accès aux traitements ne soit pas réservé aux plus aisés.
En prenant en charge le traitement, les États pourraient prévenir l’apparition de comorbidités coûteuses, telles que le diabète de type 2, les maladies cardiovasculaires et certains cancers. Ces affections, associées à l’obésité, représentent une part considérable des dépenses de santé publique. Le traitement de l’obésité, en tant que mesure préventive, permettrait non seulement de réduire ces risques, mais aussi d’améliorer significativement la qualité de vie des patients.
Au-delà de l’aspect médical et financier , il est également essentiel de prendre en compte la stigmatisation persistante liée à l’obésité. Pour de nombreuses personnes, et même pour certains professionnels de santé, l’obésité est encore perçue comme un problème lié à un « manque de volonté » ou à de mauvaises habitudes alimentaires. Ce regard biaisé alimente la stigmatisation, rendant plus difficile l’accès aux traitements. Or, l’obésité n’est pas un choix, mais bien une condition médicale qui peut, et doit, être traitée.
Le remboursement des traitements enverrait un message fort : l’obésité est une véritable maladie chronique qui mérite une prise en charge adéquate. Cela ouvrirait également la voie à des parcours de soins incluant l’éducation thérapeutique et la modification des modes de vie, bénéfiques à long terme tant pour les patients que pour leurs familles. Ce type de prise en charge complète serait, au final, moins coûteux pour les systèmes de santé.
L’obésité reste une pathologie insuffisamment prise en compte dans les programmes de formation des professionnels de santé, qu’ils soient médecins, psychologues ou paramédicaux. Pourtant, la complexité de cette maladie, qui combine des facteurs métaboliques, psychologiques et sociaux, nécessite une prise en charge pluridisciplinaire. Ce qui pose clairement problème dans la volonté d’encadrement et de suivit des GLP1?
Le manque de structures et de personnel formé, particulièrement dans la prise en charge des adolescents souffrant d’obésité, est alarmant. Il est crucial de réformer les cursus de formation afin que les professionnels de santé soient mieux équipés pour traiter cette maladie et accompagner leurs patients tout au long de leur parcours thérapeutique.
Pascale a perdu 120 kilos et se bat depuis 2003 pour une meilleure qualité de vie des patients vivant avec l’obésité.
Experte Traitements et prise en charge de la maladie.
L’obésité est une maladie complexe, tant par ses causes que par ses conséquences, et elle requiert une approche médicale, psychologique et sociale adaptée. Les traitements comme le Wegovy ou le m Mounjaro offrent une lueur d’espoir pour de nombreux patients, mais leur coût élevé et leur inaccessibilité soulèvent des questions fondamentales d’équité et de justice en matière de santé. La commercialisation de ces traitements ne peut être dissociée des débats sur leur prix, leur disponibilité pour tous, et l’importance d’un accompagnement global incluant l’éducation thérapeutique et le suivi médical continu.
Il est crucial que les décideurs politiques, les professionnels de santé et les entreprises pharmaceutiques reconnaissent que l’obésité n’est pas simplement une question d’apparence ou de choix, mais une maladie chronique qui exige des solutions pérennes. Le remboursement des traitements, l’amélioration des parcours de soins et l’éducation des médecins en matière d’obésité sont des mesures indispensables pour garantir que chaque patient puisse accéder à un traitement juste et efficace.
Finalement, l’enjeu dépasse le simple accès à un médicament : il s’agit de redéfinir notre regard sur l’obésité et d’encourager une approche respectueuse et inclusive qui permette à chacun de bénéficier des soins qu’il mérite. Le défi est immense, mais il est essentiel de faire évoluer les mentalités et les politiques pour que la lutte contre l’obésité soit à la fois humaine, équitable et efficace.
L’association de patients VOX Obesity ne se positionne pas sur l’efficacité ou l’utilité des médicaments dans le traitement de l’obésité. Notre rôle est d’informer de manière objective et transparente sur les différentes options thérapeutiques disponibles, en veillant à fournir des informations à jour et fondées sur des données scientifiques. Nous soutenons un accès équitable aux traitements pour tous, en encourageant un parcours de soins adapté aux besoins individuels de chaque patient, tout en respectant les recommandations médicales. Pour nous, l’accessibilité financière des médicaments, notamment à travers leur prix et leur remboursement, est essentielle afin que tous les patients qui en ont besoin puissent en bénéficier sans distinction de classe économique.
Senat : https://www.youtube.com/watch?v=HNDd7-FOKDY
Etude sur les habitude de régime au USA : https://rockhealth.com/insights/weighing-in-consumer-perspectives-on-weight-care/